Après la revue des thèmes récurrents dans les films de Sam Mendes dans l’article précédent, passons maintenant aux motifs visuels utilisés par Sam Mendes pour mettre en scène ses personnages.
Fenêtres et reflets
Si la figure de la maison est présente dans chacun de ses films, la transparence et les reflets sont ce que Mendes a le plus de plaisir à filmer. Certains films comme les Noces Rebelles, American Beauty ou les Sentiers de la perdition sont filmés intégralement à travers des vitres ou via des reflets. C’est une technique qui invite le spectateur à se distancier du film et des personnages pour mieux les comprendre. Dans un même temps, ces personnages passent un temps considérable à s’observer pour tenter de comprendre qui ils sont, et à scruter l’extérieur, en essayant de comprendre comment fonctionne le monde.
Les personnages d’American Beauty s’en servent pour s’observer les uns les autres : il s’agit à la fois d’une protection pour ces voyeurs, ainsi que d’une manière de donner libre cours à leur fascination pour les autres personnages. Dans les noces rebelles, les fenêtres ont davantage une fonction de frontière. Il s’agit à la fois d’une barrière pour les personnages enfermés dans les parois de verre de la maison, mais aussi un point de réflexion, qui leur permet d’exprimer leurs espérances et leurs aspirations. Jarhead quant à lui fixe ses frontières à travers les reflets des mirages du désert, ainsi que par les lunettes des snipers.
La « technique de la vitre » a une fonction plus narrative dans les sentiers de la perdition, où le reflet est quasiment le seul point de vue du spectateur. À travers les jeux de miroirs, le public peut décrypter les rapports de force et attitudes des personnages. Par exemple : quand le personnage joué par Daniel Craig tue la famille Sullivan, il se contemple dans le reflet de la vitre. Mais au même moment, il est aussi perçu de l’extérieur par l’enfant qui a échappé au massacre. Un autre exemple est la scène finale où l’on aperçoit à la fois Tom Hanks, ce qu’il observe, ce qu’il pense, ainsi que ce qui le menace, à travers un simple jeu de reflets et de transparence.
Skyfall nous offre un grand spectacle avec, entre autre la scène de Shanghai : les fenêtres nous donnent à voir trois histoires qui se rencontrent : la vente d’un tableau par Séverine, un assassinat par Patrice, et une filature par James Bond. Les vitres permettent à la fois la transparence, Bond observant Patrice qui observe Severine, mais également l’obscurité : les reflets dissimulant Bond des yeux de Patrice, et Patrice des yeux de sa cible. En brisant les parois, les trois personnages se rencontrent, et font exploser le suspense.
Skyfall est également parsemé de scènes de reflets, silhouettes et miroirs donnant à voir Bond et Silva tout en les dissimulant dans l’ombre. La scène du « personnage face à la fenêtre » typique de Mendes se trouve ici dans le manoir Skyfall : M et Bond observent l’extérieur et la menace imminente, et laissent alors libre cours à leurs confidences (M confiant son échec, et Bond son amitié)
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