Vous me direz peut-être que tout les films de la saga sont logiquement dédiés à James Bond. Et bien non ! Et c’est d’ailleurs pour ça que Quantum of Solace (Q.O.S.) restera à jamais une exception dans la saga.
En effet, si on prend tout les films depuis le début de la saga, ils présentent tous une mission, dans laquelle 007 est au centre, et fait vivre le film. Casino Royale ne fait pas exception à la règle. Même si le personnage de James Bond évolue de façon prépondérante au cours du film, c’est au cours d’une mission que son changement de comportement se fait. Tout au long des films, 007 cherche à réussir sa mission, et parfois, au passage à assouvir ses désirs : il peut s’agir d’une conquête féminine (Au service secret de sa majesté), d’une vengeance (Permis de Tuer), de l’accession au statut de 007 expérimenté (Casino Royale). Même s’il quitte à un moment sa mission, c’est elle qui le rattrape. Cela se fait avec la trahison de Vesper dans C.R., dans le démantèlement de l’organisation de Sanchez dans Permis de tuer, ou par l’exécution par Blofeld de sa femme dans OHMSS (pour ne prendre que ces trois exemples).
Ce n’est pas le cas de Quantum of Solace. Marc Forster a pris le parti d’un film intermédiaire : plutôt que de faire un épisode normal, il fait un film entièrement dédié au personnage de 007. Il aura fallu une mission, quelques cadavres et un tour du monde à notre agent pour se remettre de la mort de Vesper. On aurait pu croire qu’il avait réussi à concilier ses sentiments et sa personnalité à la fin de C.R., et bien non.
S’il a réussit à devenir compétent dans son rôle d’espion à la fin de Casino Royale, James Bond est dévasté intérieurement. Il n’a pas obtenu son minimum de réconfort, son quantum of solace. Cela l’empêche de prendre sa mission « in the bondian way ». « Une rage aveugle le consume et il se moque du mal qu’il fait », comme le dit M.
Dans ces conditions, c’est la psychologie de Bond, et pas l’intrigue du méchant qui va importer dans ce film. 007 va se retrouver à s’occuper d’une mission dans laquelle il va se jeter corps et âme, en espérant y trouver son lot de consolation, et non pas parce que c’est son boulot ou son « devoir qui le motive ». Du coup, la mission se trouve en quelque sorte en arrière plan. Bond passe plus de temps à purger ses émotions, et à se rapprocher de Camille (qui est un peu dans le même état que lui), que de s’occuper réellement de sa tâche. Ça se voit lors de la soirée en Bolivie organisée par Dominic Greene. Plutôt que de l’affronter dans un dialogue qui aurait pu être magistral, Bond se contente de soustraire au danger du méchant, Camille qui était menacée.
La situation et la menace du plan de l’ennemi va le conduire à assimiler Greene comme le responsable de la mort de Vesper et la solution à ses problèmes de coeur, alors qu’il n’est qu’un membre de Quantum. C’est pour ça qu’à aucun moment il ne ralentit, prend le temps d’interroger patiemment ses ennemis ou ne veut se retirer de la mission (Même si M le réclame).
Vous me direz que je me perds peut-être dans un délire psychologique. Cependant, les deux éléments principaux du film font ressortir ce caractère : les scènes d’actions surabondantes, et les moments de « réflexion »
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En ce qui concerne les scènes d’actions, la façon dont James se jette dans les poursuites et les bastons reflète, à mon avis, son espoir de tout régler en éliminant le danger que représentent ses ennemis. Il faut dire que Bond a rarement été aussi physique dans ses courses poursuites, et la façon de le filmer accentue cette impression. Il suffit de voir par exemple, le montage en parallèle pendant la course du Palio de Sienne, qui précipite la poursuite.
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Les scènes plus contemplatives sont à mon avis les meilleures du film. Que ce soit pendant la marche dans le désert, les scènes avec Mathis (surtout la dernière), celles avec Félix ou celle dans le gouffre… Bond est à l’image des décors et de ses relations avec ses alliés : dévasté, déserté, aride, triste, mais qui cherche du réconfort auprès de ses amis. Le personnage de Camille renforce cet aspect puisqu’elle aussi est à la recherche d’un quantum of solace.
007 finira en fin de compte par mener à bien sa mission, trouver le vrai responsable de la disparition de Vesper, et donc à rééquilibrer son tempérament. À partir de maintenant, guéri de l’affaire Vesper, il pourra devenir vraiment Bond, et le gunbarrel à la fin est là pour le montrer.
C’est pourquoi je pense que ce film n’est pas une mission de 007, mais un portrait de Bond qui essaie de se guérir de ses problèmes. Une sorte de parenthèse avant de reprendre le cours normal des choses.
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